Sébastien Delogu – Notre décadence !

Article paru dans Causeur le 4 juillet 2025

 

On a bien les députés que l’on mérite : le porte-parole des 60% de Français du sud qui ont voté pour lui, en déplacement en Algérie, encense le peuple algérien, critique notre ministre de l’Intérieur, oublie Boualem Sansal et Christophe Gleizes. Trahison ou bêtise ? on hésite. Il faut dire que l’élu éprouve des difficultés de lecture et ne connaît pas le maréchal Pétain ; on apprend la lecture au cours préparatoire, Pétain au CM2 : un grand bravo à l’Éducation nationale. À ce propos, ce n’est pas du « mépris de classe » de relever l’inculture choquante du député ; je ne crois pas qu’un seul journaliste, polémiste ou critique ait jamais fait état de la situation personnelle de Monsieur Delogu en matière pécuniaire, et d’ailleurs l’électorat mélenchoniste appartient plus volontiers à la bourgeoisie endoctrinée d’école publique de centre-ville (« Pétain, je sais juste que c’est un raciste »), qu’au peuple au sens de Marx, celui qui justement reproche à la gauche de l’avoir abandonné au profit des wokistes et des islamistes…mais passons. Eh bien, cet homme qui ne connaît pas Pétain (!), et ânonne, parle au nom de plus de vingt et un mille Français, et détient 1/577ème du pouvoir législatif. En cette République où le président s’exprime dans les colonnes de Pif Gadget, où Francky Vincent reçoit la médaille de l’ordre des Arts et des Lettres, sa carrière est prometteuse.

Donc, ce député de la nation, qui ne cache plus son mépris pour la nation, juge plus urgent d’attaquer Retailleau sur le sol algérien, que de réclamer la libération d’un intellectuel condamné à cinq ans de prison ferme pour avoir écrit des livres et s’être exprimé librement : la gauche terroriste a de beaux jours devant elle — mais celle-ci ne sera pas patriote. Après les propos que notre député a tenu à la télévision publique, heureusement pour lui que la France n’est pas l’Algérie.

Je disais que le député Delogu, élève Ducobu de la chambre basse, est comme la quinte-essence de notre époque ; avec l’ignorance, il en a la violence. La violence des idées, d’abord : on ne se pavane pas dans un pays autoritaire, quand on veut dénoncer l’autoritarisme de son propre pays. À moins de préférer à la défense de la liberté le parti de l’étranger ?… Mais non, décidément, la thèse du manque de discernement reste la plus convaincante. Faut-il le rappeler ? dans une interview donnée sur la chaîne YouTube de Sam Zirah le 6 septembre 2024, l’élu, que la cause palestinienne tient à cœur autant que celle de l’Algérie, rappelait à ses ouailles quelques vérités utiles que ne renieront pas les géopoliticiens de quartiers : Netanyahou, vous l’ignoriez ? a financé le Hamas pour récupérer des terres en Palestine, et retrouver « la vache en or » perdue… ce qui a malheureusement « déstabilisé » les fameux « accords de 1948 » (sic). Vous n’avez rien compris ? c’est normal. Et dire que pour se moquer des Insoumis, on les accusait de ne pas savoir placer l’État d’Israël sur une carte du monde : on était encore loin du compte.

La violence des propos, ensuite ; de ce parlementaire tout mielleux sous le soleil algérien, on dresserait une litanie sans fin des invectives, des haines, des vulgarités. En septembre 2024, il traitait de « pourritures » les représentants du syndicat majoritaire de la Police nationale.

La violence des gestes, enfin. Heureusement c’est la moins redoutable : car les Insoumis, qui se prennent pour des Communards de la grande Révolution, s’en tiennent généralement aux provocations de gamins, quand ils ne pleurnichent pas à la barre des tribunaux. Ainsi, la suprême rébellion de Delogu aura été de brandir dans l’hémicycle le drapeau d’un pays étranger dont il ne connaît rien, avant de prendre quinze jours de vacances : Robespierre en aurait pleuré de honte.

Monsieur Delogu l’avoue lui-même, il manque de culture. C’est une carence dont le remède est connu : il suffit de lire des livres. Je suggère Victor Hugo, Lamartine et Césaire, tous les trois députés de la nation. Et puis Sartre, Bourdieu, Foucault, Barthes et Camus — le député apprendra qu’il fut un temps où la gauche avait de la culture. Et pourquoi pas Sansal ?…

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