Chateaubriand romantique, penseur et témoin

Portrait de Chateaubriand, huile sur toile, Anne-Louis Girodet de Roussy-Trioson, 1808, collection Musée d’Histoire de la Ville et du Pays Malouin
Chateaubriand par A.-L. Girodet de Roussy-Trioson, 1808

Il faut imaginer un pont qui relie deux quartiers d’une même ville séparés par un fleuve. Au bout du pont se trouve une grande place qui donne directement sur une gigantesque avenue. Le quartier de la rive gauche, ce sont les Lumières (dix-huitième). Le pont, c’est Jean-Jacques Rousseau. La grande place, c’est Chateaubriand et l’avenue, c’est le romantisme (dix-neuvième).
Chateaubriand – à qui Jean d’Ormesson a consacré une magnifique biographie suit Rousseau sans jamais vraiment l’imiter. Comme le philosophe, il est résolument romantique dans sa prose mais il se fait mémorialiste là où Rousseau était autobiographe et penseur plutôt que philosophe au sens des Lumières. Ces trois noms – romantique, témoin, penseur – résument toute l’œuvre de Chateaubriand.

1. Le romantique

Chateaubriand est d’abord et avant tout un romantique. C’est-à-dire qu’il se lasse, comme beaucoup de ses contemporains, des raisonnements rationnels et scientifiques des philosophes des Lumières. Ni l’ironie mordante d’un Voltaire viscéralement anticlérical qui, pour cette seule raison, ne pouvait lui convenir, ni les traités politiques de Montesquieu, ni même les drames bourgeois de Diderot ne satisfont la tristesse de ce cœur oppressé. Chateaubriand recherche moins la raison que l’idéal. Il est pris d’une mélancolie poétique que Lamartine illustrera parfaitement, qui s’épanche volontiers dans les ruines des clairs de lune et que nulle théorie ne peut apaiser. Cet aspect se retrouve notamment dans ses œuvres de jeunesse, Atala et René. Ces deux ouvrages préromantiques annoncent à eux seuls, dès 1802, toute la littérature du siècle à venir. Atala est une invitation au voyage :

Si mon songe de bonheur fut vif, il fut aussi d’une courte durée, et le réveil m’attendait à la grotte du Solitaire. Je fus surpris, en y arrivant au milieu du jour, de ne pas voir Atala accourir au-devant de nos pas. Je ne sais quelle soudaine horreur me saisit. En approchant de la grotte, je n’osais appeler la fille de Lopez : mon imagination était également épouvantée, ou du bruit, ou du silence, qui succéderait à mes cris. Encore plus effrayé de la nuit qui régnait à l’entrée du rocher, je dis au missionnaire : Ô vous, que le ciel accompagne et fortifie, pénétrez dans ces ombres.
Qu’il est faible celui que les passions dominent ! Qu’il est fort celui qui se repose en Dieu ! Il y avait plus de courage dans ce cœur religieux, flétri par soixante-seize années, que dans toute l’ardeur de ma jeunesse. L’homme de paix entra dans la grotte, et je restai au-dehors plein de terreur. Bientôt un faible murmure semblable à des plaintes sortit du fond du rocher, et vint frapper mon oreille. Poussant un cri, et retrouvant mes forces, je m’élançai, dans la nuit de la caverne… Esprits de mes pères ! vous savez seuls le spectacle qui frappa mes yeux !
Le Solitaire avait allumé un flambeau de pin ; il le tenait d’une main tremblante, au-dessus de la couche d’Atala. Cette belle et jeune femme, à moitié soulevée sur le coude, se montrait pâle et échevelée. Les gouttes d’une sueur pénible brillaient sur son front ; ses regards à demi éteints cherchaient encore à m’exprimer son amour, et sa bouche essayait de sourire. Frappé comme d’un coup de foudre, les yeux fixés, les bras étendus, les lèvres entrouvertes, je demeurai immobile. Un profond silence règne un moment parmi les trois personnages de cette scène de douleur. Le Solitaire le rompt le premier : Ceci, dit-il, ne sera qu’une fièvre occasionnée par la fatigue, et si nous nous résignons à la volonté de Dieu, il, aura pitié de nous.
(Atala, F.-R. de Chateaubriand, 1801.)

René est une illustration parfaite du mal du siècle chanté des années plus tard par Constant et Musset.

Toutefois cet état de calme et de trouble, d’indigence et de richesse, n’était pas sans quelques charmes : un jour je m’étais amusé à effeuiller une branche de saule sur un ruisseau et à attacher une idée à chaque feuille que le courant entraînait. Un roi qui craint de perdre sa couronne par une révolution subite ne ressent pas des angoisses plus vives que les miennes à chaque accident qui menaçait les débris de mon rameau. O faiblesse des mortels ! ô enfance du cœur humain qui ne vieillit jamais ! voilà donc à quel degré de puérilité notre superbe raison peut descendre ! Et encore est-il vrai que bien des hommes attachent leur destinée à des choses d’aussi peu de valeur que mes feuilles de saule.
Mais comment exprimer cette foule de sensations fugitives que j’éprouvais dans mes promenades ? Les sons que rendent les passions dans le vide d’un cœur solitaire ressemblent au murmure que les vents et les eaux font entendre dans le silence d’un désert : on en jouit, mais on ne peut les peindre.
(René, F.-R. de Chateaubriand, 1802.)

La grande œuvre de Chateaubriand, celle pour laquelle il est resté dans l’Histoire, ce sont surtout les Mémoires d’outre-tombe qui le résument tout entier. On y retrouve partout cet esprit romantique si caractéristique de sa prose, – à travers, notamment, les grandes esquisses des paysages américains et les peintures des panoramas d’Égypte et de Grèce. Cet extrait aussi, qui décrit un coucher de lune, est digne des plus belles pages de Rousseau :

Établie par Dieu gouvernante de l’abîme, la lune a ses nuages, ses vapeurs, ses rayons, ses ombres portées comme le soleil ; mais comme lui elle ne se retire pas solitaire : un cortège d’étoiles l’accompagne. À mesure que sur mon rivage natal elle descend au bout du ciel, elle accroît son silence qu’elle communique à la mer ; bientôt elle tombe à l’horizon, l’intersecte, ne montre plus que la moitié de son front qui s’assoupit, s’incline et disparaît dans la molle intumescence des vagues. Les astres voisins de leur reine, avant de plonger à sa suite, semblent s’arrêter, suspendus à la cime des flots. La lune n’est pas plutôt couchée, qu’un souffle venant du large brise l’image des constellations, comme on éteint les flambeaux après une solennité.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

Le romantisme de Chateaubriand ne sert pas que la description des paysages. Il offre aussi à ses proches, comme sa sœur Lucile, des tombeaux de mots qui sont des sépultures éternelles :

Ma sœur fut enterrée parmi les pauvres : dans quel cimetière fut-elle déposée ? dans quel flot immobile d’un océan de morts fut-elle engloutie ? dans quelle maison expira-t-elle au sortir de la communauté des Dames de Saint-Michel ? Quand, en faisant des recherches, quand, en compulsant les archives des municipalités, les registres des paroisses, je rencontrerais le nom de ma sœur, à quoi cela me servirait-il ? Retrouverais-je le même gardien de l’enclos funèbre ? retrouverais-je celui qui creusa une fosse demeurée sans nom et sans étiquette ? Les mains rudes qui touchèrent les dernières une argile si pure en auraient-elles gardé le souvenir ? Quel nomenclateur des ombres m’indiquerait la tombe effacée ? ne pourrait-il pas se tromper de poussière ? Puisque le ciel l’a voulu, que Lucile soit à jamais perdue ! Je trouve dans cette absence de lieu une distinction d’avec les sépultures de mes autres amis. Ma devancière dans ce monde et dans l’autre prie pour moi le Rédempteur ; elle le prie du milieu des dépouilles indigentes parmi lesquelles les siennes sont confondues : ainsi repose égarée, parmi les préférés de Jésus-Christ, la mère de Lucile et la mienne. Dieu aura bien su reconnaître ma sœur ; et elle, qui tenait si peu à la terre, n’y devait point laisser de traces. Elle m’a quitté, cette sainte de génie. Je n’ai pas été un seul jour sans la pleurer. Lucile aimait à se cacher ; je lui ai fait une solitude dans mon cœur : elle n’en sortira que quand j’aurai cessé de vivre.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

Et même quand il évoque sa fin, après avoir longuement décrit celle de son rival Napoléon, il ne peut s’empêcher de se tourner vers l’Orient, un thème commun aux cœurs romantiques :

Ah ! si du moins j’avais l’insouciance d’un de ces vieux Arabes de rivage, que j’ai rencontrés en Afrique ! Assis les jambes croisées sur une petite natte de corde, la tête enveloppée dans leur burnous, ils perdent leurs dernières heures à suivre des yeux, parmi l’azur du ciel, le beau phénicoptère qui vole le long des ruines de Carthage ; bercés du murmure de la vague, ils entr’oublient leur existence et chantent à voix basse une chanson de la mer : ils vont mourir.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

Les Mémoires d’outre-tombe ne seraient pas restés dans l’Histoire comme la grande œuvre de Chateaubriand s’ils n’étaient qu’un ouvrage romantique de prose poétique. Ils dépassent Atala et René parce qu’ils sont aussi et surtout l’autobiographie d’un acteur majeur de la France post-révolutionnaire.

2. Le témoin

Chateaubriand a rencontré les plus grands personnages de son temps. Même si ses Mémoires ne sont pas toujours fiables – quantité d’articles ont été écrits à ce propos –, ils restent un document historique de première importance. En ce sens, Chateaubriand se rapproche de Rousseau. En effet, Rousseau est comme lui à cheval entre les Lumières et le romantisme ; et comme le mémorialiste, le philosophe a publié une autobiographie savoureuse tout empreinte de romantisme.
Mais Chateaubriand est surtout connu pour ce mélange de haine et d’admiration qu’il vouait au Premier consul – puis à l’Empereur des Français. Ce mélange est particulièrement perceptible dans l’extrait suivant, où l’auteur du Génie du christianisme raconte l’effet que vient de produire sur lui sa toute première entrevue avec celui qui n’était encore que Bonaparte :

Bonaparte incontinent s’éloigna. Comme à Job, dans ma nuit, « un esprit est passé devant moi ; les poils de ma chair se sont hérissés ; il s’est tenu là : je ne connais point son visage et j’ai entendu sa voix comme un petit souffle. »
Mes jours n’ont été qu’une suite de visions ; l’enfer et le ciel se sont continuellement ouverts sous mes pas ou sur ma tête, sans que j’aie eu le temps de sonder leurs ténèbres ou leurs lumières. J’ai rencontré une seule fois sur le rivage des deux mondes l’homme du dernier siècle et l’homme du nouveau, Washington et Napoléon. Je m’entretins un moment avec l’un et l’autre ; tous deux me renvoyèrent à la solitude, le premier par un souhait bienveillant, le second par un crime.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

On ne le sait pas toujours, mais les Mémoires d’Outre-tombe contiennent une biographie complète de Napoléon. Sur des centaines de pages, Chateaubriand raconte avec force détails la vie de l’Empereur, depuis sa naissance jusqu’à sa mort. Il raconte cette vie avec toute la passion qui est la sienne. Il donne son avis sur les décisions impériales, commente longuement et au préjudice de Napoléon l’assassinat du duc d’Enghien, et saupoudre son récit d’un art littéraire qui lui est particulier. En attestent ces quelques lignes relatives à la campagne de Russie et au Vol de l’Aigle :

Le bruit se répand que le Kremlin est miné : des serviteurs se trouvent mal, des militaires se résignent. Les bouches des divers brasiers en dehors s’élargissent, se rapprochent, se touchent : la tour de l’Arsenal, comme un haut cierge, brûle au milieu d’un sanctuaire embrasé. Le Kremlin n’est plus qu’une île noire contre laquelle se brise une mer ondoyante de feu. Le ciel, reflétant l’illumination, est comme traversé des clartés mobiles d’une aurore boréale. […]
Lorsque Napoléon passa le Niémen à la tête de quatre cent mille fantassins et de cent mille chevaux pour faire sauter le palais des czars à Moscou, il fut moins étonnant que lorsque, rompant son ban, jetant ses fers au visage des rois, il vint seul, de Cannes à Paris, coucher paisiblement aux Tuileries.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

La mort de l’Empereur déchu permet à Chateaubriand de déployer toute sa poésie :

Enfin, le 5, à six heures moins onze minutes du soir, au milieu des vents, de la pluie et du fracas des flots, Bonaparte rendit à Dieu le plus puissant souffle de vie qui jamais anima l’argile humaine. Les derniers mots saisis sur les lèvres du conquérant furent : « Tête… armée, ou tête d’armée. » Sa pensée errait encore au milieu des combats. Quand il ferma pour jamais les yeux, son épée, expirée avec lui, était couchée à sa gauche, un crucifix reposait sur sa poitrine : le symbole pacifique appliqué au cœur de Napoléon calma les palpitations de ce cœur, comme un rayon du ciel fait tomber la vague.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

Chateaubriand a déjà réussi un double exploit : celui de composer admirablement avec les règles du romantisme pour nous faire revivre les événements de la période la plus glorieuse de l’histoire de France. Il ne lui reste plus qu’à distiller, au fil des pages, sa pensée politique.

3. Le penseur

C’est en politique que les contradictions de Chateaubriand se révèlent le plus. Disons-le en un mot : franchement libéral, il a pourtant jusqu’au bout soutenu la monarchie légitime par un reste d’honneur, mais aussi, sans doute, par amour des causes perdues.
Au fond de lui, le vicomte est tocquevillien : homme de son temps, il constate l’avènement inéluctable des démocraties et la fin programmée des monarchies. Il ne désespère pourtant pas de voir se former en France une monarchie parlementaire à l’anglaise.
Chateaubriand est également un ardent défenseur de la religion. Dans Le Génie du christianisme, il démontre les apports majestueux de la religion chrétienne dans les arts et la civilisation occidentale. Les Mémoires servent de supplétif à son réquisitoire, comme en attestent, par exemple, ces quelques lignes :

Tout paraissait en effet annoncer ma chute : quelle espérance pouvais-je avoir, moi sans nom et sans prôneurs, de détruire l’influence de Voltaire, dominante depuis plus d’un demi-siècle, de Voltaire qui avait élevé l’énorme édifice achevé par les encyclopédistes et consolidé par tous les hommes célèbres en Europe ? Quoi ! les Diderot, les d’Alembert, les Duclos, les Dupuis, les Helvétius, les Condorcet étaient des esprits sans autorité ? Quoi ! le monde devait retourner à la Légende dorée, renoncer à son admiration acquise à des chefs-d’œuvre de science et de raison ? Pouvais-je jamais gagner une cause que n’avaient pu sauver Rome armée de ses foudres, le clergé de sa puissance ; une cause en vain défendue par l’archevêque de Paris, Christophe de Beaumont, appuyé des arrêts du parlement, de la force armée et du nom du roi ? N’était-il pas aussi ridicule que téméraire à un homme obscur de s’opposer à un mouvement philosophique tellement irrésistible qu’il avait produit la Révolution ? Il était curieux de voir un pygmée roidir ses petits bras pour étouffer les progrès du siècle, arrêter la civilisation et faire rétrograder le genre humain ! […]
Le Génie du christianisme commence la révolution religieuse contre le philosophisme du XVIIIe siècle. Je préparais en même temps cette révolution qui menace notre langue, car il ne pouvait y avoir renouvellement dans l’idée qu’il n’eût innovation dans le style. Y aura-t-il après moi d’autres formes de l’art à présent inconnues ? Pourra-t-on partir de nos études actuelles afin d’avancer, comme nous sommes partis des études passées pour faire un pas ? Est-il des bornes qu’on ne saurait franchir, parce qu’on se vient heurter contre la nature des choses ? Ces bornes ne se trouvent-elles point dans la division des langues modernes, dans la caducité de ces mêmes langues, dans les vanités humaines telles que la société nouvelle les a faites ? Les langues ne suivent le mouvement de la civilisation qu’avant l’époque de leur perfectionnement ; parvenues à leur apogée, elles restent un moment stationnaires, puis elles descendent sans pouvoir remonter.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

En matière de littérature, Chateaubriand se rapproche évidemment des Anciens plus que des Modernes :

La littérature française, disais-je, va changer de face ; avec la Révolution vont naître d’autres pensées, d’autres vues des choses et des hommes. Il est aisé de prévoir que les écrivains se diviseront. Les uns s’efforceront de sortir des anciennes routes ; les autres tâcheront de suivre les antiques modèles, mais toutefois en les présentant sous un jour nouveau. Il est assez probable que les derniers finiront par l’emporter sur leurs adversaires, parce qu’en s’appuyant sur les grandes traditions et sur les grands hommes, ils auront des guides plus sûrs et des documents plus féconds.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

Chateaubriand, enfin, est connu pour ses réflexions tout ensemble réactionnaires et prophétiques. On dirait aujourd’hui qu’il est le chantre du c’était mieux avant. Mais qu’on ne s’y trompe pas. Cette philosophie n’est qu’un tremplin qui lui permet, encore une fois, d’élever la réflexion à un niveau supérieur :

À mesure que le monde présent se retire, le monde passé me revient. Si les générations actuelles dédaignent les générations vieillies, elles perdent les frais de leur mépris en ce qui me touche : je ne m’aperçois même pas de leur existence. […]
La mode est aujourd’hui d’accueillir la liberté d’un rire sardonique, de la regarder comme vieillerie tombée en désuétude avec l’honneur. Je ne suis point à la mode, je pense que sans la liberté il n’y a rien dans le monde ; elle donne du prix à la vie ; dussé-je rester le dernier à la défendre, je ne cesserai de proclamer ses droits. Attaquer Napoléon au nom de choses passées, l’assaillir avec des idées mortes, c’est lui préparer de nouveaux triomphes. On ne le peut combattre qu’avec quelque chose de plus grand que lui, la liberté : il s’est rendu coupable envers elle et par conséquent envers le genre humain.
Vaines paroles ! mieux que personne, j’en sens l’inutilité. Désormais toute observation, si modérée qu’elle soit, est réputée profanatrice : il faut du courage pour oser braver les cris du vulgaire, pour ne pas craindre de se faire traiter d’intelligence bornée, incapable de comprendre et de sentir le génie de Napoléon, par la seule raison qu’au milieu de l’admiration vive et vraie que l’on professe pour lui, on ne peut néanmoins encenser toutes ses imperfections. Le monde appartient à Bonaparte ; ce que le ravageur n’avait pu achever de conquérir, sa renommée l’usurpe ; vivant il a manqué le monde, mort il le possède.
(Mémoires d’outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848.)

On pourrait citer presque tous les Mémoires tant ils regorgent de profondeur philosophique et de précieuses anecdotes. Ils sont assurément la plus grande œuvre de Chateaubriand, puisqu’ils enferment les trois facettes de l’écrivain. Les quelques extraits cités dans ce chapitre, presque tous issus des Mémoires, résument ainsi la triade que constitue Chateaubriand : un romantique précoce, un témoin majeur de son époque, un penseur libre et brillant.

 

Lectures conseillées :

LE ROMANTIQUE

  • Atala, F.-R. de Chateaubriand, 1801.
  • René, F.-R. de Chateaubriand, 1802.
  • Itinéraire de Paris à Jérusalem, F.-R. de Chateaubriand, 1811.

LE TEMOIN

  • Les Mémoires d’Outre-tombe, F.-R. de Chateaubriand, 1848

LE PENSEUR

  • Génie du christianisme, F.-R. de Chateaubriand, 1802

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